Déguisement
Si les montagnes parlaient, qui les blâmerait ?
Tellement de secrets tus,
Que la neige, une fois fendue, renvoyait au terrier ;
Et toi, mon amour, tu nages dans la boue,
En croyant m’épater avec ton déguisement.
Amlou
Ta mère écrase toujours les amandes,
Et de sa sueur, elle arrose l’amlou
Demain, nous nous y baignerons
Les vieux ont déjà donné leur bénédiction.
Vœux pieux
Toi, mon amour, tu veux souffler ma mémoire
Je hanterai tes rêves, désormais…
Tu quémanderas sans cesse un pardon,
Que je suis incapable de t’accorder !
Insomnie
Depuis l’éternité, je ne dors plus, maman
Si tu savais, maman, combien cela est dur !
Les enfants racontent chaque matin, leurs rêves ;
Et moi, je n’ai que mon insomnie à raconter.
Embryon
J’attends de voir naître l’embryon de moi
Si cela devait arriver demain,
Je souhaiterais que ce ne soit pas l’émoi
Qui aura forcé la main du destin.
Bienvenus !
Soyez les bienvenus, vous qui arrivez de nulle part !
Si la montagne vous fait peur le matin,
Attendez de voir la meute du soir
Ne riez pas des oiseaux dont les ailes brûlées
Donnent de l’appétit au forgeron du coin
Il sait désormais que le Souk est pour demain.
Balance
Qu’attendez-vous pour nous rejoindre ?
Sur les traces des ancêtres, on n’a rien à craindre
La balance est une affaire de mesure
Crois-le ou végète dans l’usure !
Vérité
Il n’y a pas de vérité que sa propre vérité
Hier, aujourd’hui et pour l’éternité
Combien de fois la langue a glissé
Sur une toile de certitudes bien tissée.
Agonie
Reprenez-vous ! Vous, qui nagez piètrement avec le courant
Ne percevez-vous jamais la douleur dans l’œil d’un mourant
Combien de blessures faut-il pour que coule le sang ?
N’est pas forcément savant celui qui connaît par cœur sa leçon.
Limites
Si tu tends la main au-delà de ta tête,
Le vent furieux, cruellement, la coupera
Les charognards de service feront ta fête,
Tu imploreras les astres, personne ne t’écoutera.
Insignifiant
Les anges te protègent, et tu n’en as cure
Tu apprendras bientôt à faire dans la mesure
Ce n’est pas parce qu’il ne pleut pas qu’il y a sécheresse
Mais parce que toi, insignifiant, adores la détresse.
Espoir
Je reviens, maman, de loin ; de très loin !
Nulle part n’existe plus limpide que ton soin !
Même si le lait abandonne tes seins,
Ils me feront chaque jour plus de bien.
Retour
Que tu aies tort ou que tu aies raison,
Tu retourneras fatalement à la maison.
Cruel sera le vide qui soufflera dans l’air
Tu tourneras en rond et tu coucheras par terre.
Ainsi va la vie pour tous les vagabonds
Destin de rêve et choix moribonds.